La finale au bout de mon colt

Bon, ma diseuse de bonne aventure l’avait prédit : « la qualif ne tiendrait qu’à un fil : ». Nos bobines réjouies à l’issue du match en disait long sur la résistance de la corde. Adepte du direct plutôt que du replay, je ne vais pas vous imposer le calvaire d’un récit détaillé d’une confrontation en 14 sets. Je préfère vous offrir la fin du synoptique d’un scénario « demi-finalement » heureux écrit par nos Bleus. D’abord : retour sur images. L’instantané routier vécu à mon arrivée à Coubertin avait tout du prémonitoire. Ma moitié au volant a dû limiter sa vitesse pour ne pas écraser, vu de loin, un quidam hors des clous, traversant la chaussée. A y regarder de plus près je découvre qu’il s’agit de notre ami entraîneur du Plessis-Robinson, le corps courbé vers l’asphalte, la tête dans ses chaussettes, lui d’habitude si droit d’allure et sinueux du verbe (avec les arbitres). On aurait dit le Christ sur le chemin du Golgotha ! En route vers la crucifixion. Avec l’imprudence routière qui me caractérise, je m’écrie sans crier gare : « Avec un coach dans cet état, ce soir on gagne le match… ». Une sorte de révélation irrationnelle dont le seul avantage est d’aborder de façon positive une frayeur inconsciente. C’est donc le moral au zénith que j’entre dans notre arène avec l’espoir que nos Bleus ne feront qu’une bouchée des « Hiboux » robinsonnais.

Mon habituelle ronde « polie-tique » de poignées de mains amicales dans l’espace bar-restauration va bientôt me révéler une surprise. Et me faire entrer dans une toute autre compétition. Au hasard d’une rencontre, en attendant patiemment qu’on me livre ma crêpe bretonne au caramel salé de Guérande, j’apprends qu’un plumitif de mon espèce a aussi commencé à sévir du côté du Plessis-Robinson. Et, histoire de titiller ma fausse humilité, cet interlocuteur ami m’annonce que ce nouvel « humeuriste » banlieusard affiche un duvet stylistique de la plus haute qualité. Bigre, me dis-je, si la compétition s’en mêle jusque sur ce terrain là, je risque bien d’y perdre le peu d’aura de mon exclusivité nationale. De fait, dès mon retour « at home », accouru de curiosité sur le site du Plessis-Robinson, je découvre l’oeuvre romanesque d’un véritable virtuose du clavier. J’ai tout de suite repéré qu’on allait désormais se livrer un match « culture contre agriculture » (Souvenez-vous de ma bafouille « le bonheur est dans mon pré) ! Pas question de renier mes origines teintées de pâquerettes champêtres mais le méli-mélo musical et cinématographique du « poulbobo » parisien rejouant « Quand la musique est bonne » et « Il était une fois dans l’Ouest », m’a expédié un « Molten » dans le plexus. J’ai compris que ce cow-boy du crayon avait la gâchette facile. S’il veut tenir le terrain, le Lucky Luke nazairien que je suis va devoir désormais jouer du colt.

Mais revenons au volley, objet de tous nos délires. Voilà donc nos Bleus honorés d’une demie-finale de play-offs à disputer contre Rennes qui joue sa survie en Ligue A. Une place parfaitement conforme à la hiérarchie du championnat régulier puisque, outre Cannes « premier de cordée » pour une accession directe, ses trois suivants : Narbonne, Cambrai et le SNVBA bouclent le dernier carré magique pour s’offrir une finale à Paris. A l’issue du match d’appui victorieux, je me suis attaché à tout entendre des plus déprimés aux plus utopistes. Dans l’incapacité d’en sortir la moindre jugement objectif, je m’en suis remis à l’analyse statistique des Live LNV. J’y ai vu que deux seuls rennais ont dévoré du Lyon jusqu’à plus soif : le récent joker international Kevin Leroux et son capitaine Xavier Kapfer, épaulés de l’ex-international tourangeaux Hardy-Dessources ! Certes, comme me l’a rappelé Roger Vallée « Rennes, c’est du lourd… », mais venant d’apprendre la qualification des Herbiers pour la finale de Coupe de France de football, je me suis dit qu’en sport la victoire se construit aussi – et peut-être même surtout – dans le mental. Et comme l’a dit notre coach Gilles après s’être agenouillé de joie sur le parquet juste après le parpaing de la victoire signé Colo : « C’est parce qu’ils sont forts dans leur tête qu’ils viennent de faire ce truc énorme… ».  Amis Rennais, à bon entendeurs salut, car une centaine de supporteurs maritimes se prépare à débarquer salle Colette Besson, ce samedi soir. Et je puis déjà vous l’annoncer, ce ne sera pas que pour manger des galettes-saucisses. Ensemble, nous allons « créer la vague ».

Luc VIEL

Le 18 avril 2018